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I DON'T NEED ANY FRIENDS

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Le Projet Phoenix. Ma rédemption à moi, mon petit coin de Paradis. Enfin, ça serait le cas si je n’avais pas à voir Mademoiselle Je-suis-une-salope-nymphomane-et-totalement-psychopathe toute la sainte journée à chaque jours que Dieu fait. Voir Nadège Hemingway me rappelait le fait que l’on avait été ensemble, tous les deux, et que la nuit où mon père adoptif était décédé, je la tenais dans mes bras. Tout était sa faute. Si elle m’avait dit que mon téléphone avait sonné au lieu de l’éteindre et de se taire. Si elle m’avait prévenu. Si elle n’avait pas été qu’une salope égoïste, si elle avait eu un cœur, une âme, un minimum d’esprit. Elle m’aurait dit que j’avais loupé un appel. Elle me l’aurait dit, je serais parti défendre mon père et tout se serait bien passé. Je n’aurais pas pour elle une haine sans pitié. Ce ne serait pas la seule femme au monde que j’accepterais de voir morte. Certes, je ne touchais pas aux femmes, jamais, je ne pourrais pas la tuer de mes mains, mais je me dis que si jamais ce cher Jack veut se faire la main sur elle, peut-être que… Je ne m’y opposerais pas. Quoique. Mon esprit chevaleresque à deux balles cinquante risquerait de me faire réagir. Quoique. Oh ! Je n’en avais pas la moindre idée ! Pas la moindre idée. En parlant de chevalier, je décidais d’aller en ville trouver un livre pour ma petite protégée, la belle Iseult. Quelle histoire. Comment arrivait-elle ne serait-ce qu’à m’apprécier alors qu’elle m’avait vu abattre son père alors qu’elle n’était qu’une enfant.

Je m’habillais de manière à passer inaperçu dans les rues de ce vieux Londres, que nous ne connaissions plus. A notre époque, je serais passé comme étant désuet mais ce n’était pas le cas à ce moment-là : tout le monde avait cette classe bien particulière, typiquement ancienne et britannique. Tout le monde s’habillait de la même manière de toute façon… Je m’éclipsais de la base et descendais jusqu’à Soho, et plus précisément à Charing Cross Road. Je profitais de ma longue marche pour fumer un peu, et dire qu’à l’époque c’est bien vu, et qu’ils étaient bien loin du « Fumer tue » que l’on nous rabâche à longueur de temps, ni toutes ces images où l’on vous montre des poumons en pleine déperdition ou quelconque autre organe. A l’époque, cela correspondait à un niveau de vie, à quelque chose de classe, de respectable et de respecté. Je portais donc une fine cigarette à mes lèvres. Je fus dragué, ou plutôt, on tenta de me racoler une ou deux fois, mais je parvenais tout de même à m’extraire des griffes de prostituées de bas étages ayant une notion plus que relative de toutes hygiènes. Je les plaignais les pauvres, elles étaient obligées de supporter les pires sévices pour des sommes de misère. Tout juste ce que nous considérons désormais comme quelques centimes.

Puis j’arrivais devant l’échoppe d’une librairie. Elle me paraissait assez sympathique, et tous ces livres anciens et plus récent qui se bousculaient entre les étagères réussirent à faire briller mes yeux de mille feux. J’avais toujours aimé les livres, c’est ce qui m’avait sauvé à l’orphelinat, pouvoir me cacher à la bibliothèque, lire encore et encore. Puis après mon adoption, l’école à la maison se basait également beaucoup sur la lecture. Toujours lire plus. J’adorais ça. Mais peut-être avais-je des prédispositions après tout, ce n’est pas tous les jours que l’on croise un jeune homme du nom d’Heathcliff, n’est-ce pas ? J’entre dans la boutique, une petite clochette tinte, l’un des vestiges que l’on a gardé du passé. Je parcours les différentes étagères, les doigts courant sur les dos des ouvrages présents devant moi, regardant les différents noms, les différents auteurs. Tant et si bien que je ne vis pas le jeune homme dans lequel je rentrais. « Oh pardon, excusez-moi ! » lançais-je avant de lever les yeux vers la personne que j’avais bousculée. Oh. Monsieur Toutou. Eh bien, il fallait bien que je tombe sur lui seul à seul un de ces jours… On faisait partie du même programme après tout. Et peut-être n’était-il pas si con que ce qu’il paraissait… Nous allions bien pouvoir le constater dans les minutes suivantes…

Tous les matins c'était pareil. La même routine. Se forcer à se lever histoire de ne pas passer la journée à déprimer, ne pas faire la tronche toute la journée, éviter de penser trop à Nadège. Depuis qu'elle était retournée avec Keenan, il se sentait mal. Très mal. Heureusement, comme il avait toujours été un peu solitaire, son côté plus taciturne ne s'était pas réellement vu... Mis à part Eglantine personne n'avait du remarquer son changement d'humeur. Il était à bout, il avait l'impression que tout ce qu'il avait vécu avec Nadège n'était rien. Que malgré les dires de la jeune femme, il n'était pas grand chose pour elle... son meilleur ami. La blague. Il était juste son chienchien, il était prêt à mourir pour elle, à se plier en quatre, et elle... elle la seule chose qu'elle savait réellement faire c'était de parler de Keenan, qu'il ne fallait pas qu'il soit jaloux et patati-patata. Des fois, il se disait qu'il ferait mieux de lui avouer qu'il l'aimait à en crever, comme ça, peut-être qu'elle arrêterait de parler de son super-génial petit ami, peut-être que ça signifierait la fin de leur amitié mais au final lui, il ne pouvait guère allait plus mal qu'aujourd'hui. La seule chose qui l'empêchait d'avouer c'était ses sentiments, c'est parce qu'il savait que malgré tout Nadège avait un peu besoin de lui, rien que pour ce point commun qu'ils avaient: leur passé. Le jeune homme avait l'impression de dépérir un peu plus chaque jour, et Nadège n'avait pas l'air de s'en rendre compte jusqu'à quel point "tout cela" l'avait blessé. On mettra ça sur le coup du "Keane essaie de faire bonne figure devant la belle histoire de la préserver".
Histoire de se changer les idées, il décida qu'aujourd'hui, il ferait un petit tour dans Londres, et plus précisément à la librairie, au moins lire lui occuperait pendant un moment l'esprit et c'est tout ce dont il avait besoin. Il chercha pendant un petit moment Eglantine pour savoir si elle voulait venir avec lui, mais la demoiselle était introuvable, par contre, pendant cette "recherche" il arriva à passer deux fois devant le couple Nadège-Keenan. Génial. Il détestait l'amour. Il détestait ce sentiment de dépendance qu'il avait quand il ne pouvait pas parler à sa "meilleure amie". Il détestait tout cela et n'arrivait pas à s'en dépêtrer, la situation était totalement hors de son contrôle, ce qui l'emmerdait encore plus. Il aimait avoir un contrôle totale de ses choix, de ses gestes, de ses sentiments, mais là, ce n'était plus le cas, dès qu'il s'agissait de la belle brune toute sa partialité le quittait.
Après avoir revêtit les habits de l'époque, Keane s'aventura dans Londres. Il marcha pendant une bonne heure histoire de se promener, passa devant les maisons en ruines où il avait passé, il n'y a pas si longtemps, une nuit avec Nadège... puis, il se décida enfin à se diriger vers la librairie. Il adorait cette odeur de livres. C'était.... envoûtant. Maintenant il n'y avait plus qu'à trouver un ou plusieurs livres qui lui plairaient. Non, il n'était pas embêtant généralement et lisait de tout, mais aujourd'hui il n'était franchement pas d'humeur à lire des choses "trop fleurs bleues", romantiques. Des livres où l'on parle d'amour, du prince charmant et compagnie. Foutaises. Tout cela n'étaient que des foutaises à faire croire aux enfants. Après avoir cherché une bonne dizaine de minutes, un livre attira son attention, il en avait déjà entendu parler mais n'avait pas eu l'occasion de le lire. Parfait. Alors qu'il en cherchait un deuxième à acheter quelqu'un lui rentra dedans. Zen. Il fallait qu'il garde son calme. Il leva les yeux vers l'homme qui venait de s'excuser et fit une fine grimace en voyant de qui il s'agissait. Il ne manquait plus que lui. Cet Heathcliff qui détestait Nadège pour d’obscures raisons. Ce garçon qui faisait parti du même programme que lui. Pour la première fois ils se retrouvaient en face à face, et cela allait certainement faire des étincelles. Se passant une main dans ses cheveux bouclés, Keane se décida enfin à prendre la parole: Ce n'est rien. répliqua t-il de mauvais grès. Et, après quelques secondes de silence, il se décida à reprendre la parole Qu'est-ce que tu fais là Wakefield ?! Question idiote, qu'il regretta immédiatement. Bien sûr que l'autre garçon était venu acheter des livres. Et merde. Il venait de se rendre ridicule devant ce stupide gars.